Retour sur l’histoire du dopage
► La performance comme moteur humain

► L’organisation de la lutte antidopage
► Le sportif un être voué à l’exemplarité

 

Avec les progrès technologiques en science ou en médecine, l’être humain est de plus en plus capable d’améliorer ses performances. Cela passe par de nouvelles méthodes d’entraînements, de nouveaux outils, un changement d’alimentation et plus globalement une révolution du quotidien et de l’hygiène de vie.

 

Il est dans la nature de l’Homme de vouloir améliorer ses qualités, ses compétences, de se mettre en compétition. Le sport n’est que l’expression la plus spontanée de cette course à la performance dans laquelle l’Homme s’est engagé.

 

La trace la plus ancienne de dopage que l’on puisse retrouver se trouve en Grèce Antique, au VIème siècle av. JC. Les athlètes en fonction de leurs disciplines ne mangeaient plus que de la viande à quelques jours des épreuves. Quand bien même la bande dessinée Astérix aux Jeux Olympiques narrait la disqualification des Romains pour dopage, il s’agit là d’un anachronisme. En effet, il était à cette époque impossible technologiquement de débusquer les tricheurs, alors même que la société ne condamnait pas les usages faits de divers produits. L’usage de substances était monnaie courante au même titre qu’aujourd’hui les sportifs utilisent les boissons énergisantes, les poudres protéinées ou encore les compléments alimentaires.

 

La donne a radicalement changé depuis qu’il est devenu possible de dépister les sportifs afin de trouver dans leur organisme des produits interdits. A moins que l’intérêt des organisations sportives pour la santé des athlètes à moyen et long terme n’ait entraîné la création d’interdits ?

 

Le début du XXe siècle marque un tournant dans la pratique du dopage. Le sport acquiert une importance sociale, culturelle et économique :  la couverture médiatique des événements devient mondiale, la course au record est enclenchée et, de fait, les enjeux financiers prennent de l’ampleur. Un autre cap est passé lorsque le sport prend une dimension politique. Les Etats vont utiliser leurs sportifs comme moyen de rayonnement et outils de communication.
Ce sont ces phénomènes qui vont faire exploser les pratiques dopantes et ce à l’échelle mondiale. Qui blâmer alors qu’il n’existe aucune règlementation ou institution anti-dopage ?

 

Au sein même des sportifs, la pratique du dopage est quasiment unanime. La société ne condamne pas les usages de produits, elle n’en a pratiquement pas connaissance. Le sport n’est encore pour beaucoup de suiveur qu’un divertissement. Mais pour les acteurs les enjeux ont déjà largement dépassé le cadre du divertissement.

 

Pourtant les fédérations sportives ont conscience du phénomène et certaines ont tenté d’agir. En 1928 la Fédération internationale d’athlétisme amateur (IAAF) décida de prohiber le dopage. Mais aucun test antidopage n’est assez efficace pour soutenir cet interdit.
En 1960, la mort du cycliste danois Knud Enemark Jensen aux Jeux Olympiques va agir comme un premier électrochoc. Des traces de médicaments à but dopants sont retrouvées dans son corps.
En 1965 la France et son voisin belge sont les premiers pays à réagir et légiférer sur le sujet. La loi Herzog énonce : « Quiconque aura en vue ou au cours d’une compétition sportive, utilisé sciemment l’une des substances déterminées par le règlement d’administration publique, qui sont destinées à accroître artificiellement et passagèrement ses possibilités physiques et sont susceptibles de nuire à sa santé ».

 

Des contrôles antidopage voient le jour, notamment au Tour de France. Un coureur, Tom Simpson avoue et assume sa pratique du dopage, mais lorsqu’il meurt sur une étape au Mont Ventoux en 1967, et que son autopsie révèle une quantité certaine d’amphétamine et de méthylamphétamine dans son organisme, la « guerre contre le dopage » prend réellement son départ.

 

Le Comité International Olympique (CIO) établi une première liste des produits prohibés et, aux Jeux Olympiques de Grenoble et Mexico en 1968, plusieurs tests de dépistages sont organisés. Le dopage est désormais interdit.

 

 

Les organismes sportifs sont en guerre contre le dopage depuis plusieurs décennies, mais l’opinion publique y est assez indifférente. Pourtant, en 1989, le mur de Berlin s’effondre et révèle au monde entier l’existence du dopage d’Etat qu’organisait l’Allemagne de l’Est. La prise de conscience est planétaire.

 

En 1999, quelques mois après la grande affaire cycliste Festina,  le CIO organise une Conférence mondiale sur le dopage à Lausanne qui aboutit à la création de l’Agence Mondiale Antidopage (AMA).
L’AMA est financée à 50% par les gouvernements et à 50% par le Mouvement Olympique. Son rôle sera d’organiser la lutte et la sensibilisation contre le dopage dans le monde entier.

 

Le dopage organisé a alors énormément d’avance sur les organismes de lutte. Les nouvelles technologies aident à dépister, mais dans le même temps, les tricheurs profitent aussi des évolutions pour masquer leurs agissements (transfusions sanguines, manipulations génétiques ou biologiques, etc). L’AMA, les fédérations sportives et les Etats tentent de sensibiliser les sportifs car le dopage  revêt plusieurs risques :

  • Pour la santé du sportif en raison des substances utilisées en excès et simultanément en comparaison aux usages thérapeutiques.
  • Pour la société : l’idée que la transgression de règles permet le succès personnel, financier ou professionnel est inacceptable pour toute société de droit. Le message transmis à la jeunesse et pour son éducation est destructeur.

 

L’AMA se dote d’un code mondial antidopage qui veille à l’harmonisation, à la coordination et à l’efficacité des programmes antidopage internationaux et nationaux en matière de détection, de dissuasion et de prévention du dopage. Ce code fonctionne avec  8 « standards internationaux » qui organisent la lutte avec la liste des interdictions, les contrôles et enquêtes, les laboratoires (c’est ce standard qui énonce les exigences auxquelles les laboratoires accrédités doivent se soumettre. Ce sont ces exigences qui n’ont pas été respectées par les laboratoires de Moscou et Sotchi et qui sont aujourd’hui à l’origine de la suspension de la Russie des compétitions internationales), les autorisations d’usage à des fins thérapeutiques, etc.

 

L’AMA délègue ses compétences dans chaque pays à une institution. En France, il s’agit de l’Agence Française de Lutte contre le Dopage (AFLD). Aujourd’hui, tout sportif licencié peut faire l’objet d’un contrôle antidopage, et s’expose à des sanctions en cas de test positif.

 

Dans l’opinion publique, il arrive régulièrement d’entendre certains plaider pour autoriser des produits. Le sport serait-il le seul domaine dans lequel le dopage est pourchassé ? Le cannabis et la cocaïne n’apportent aucun avantage à un sportif, et pourtant leur consommation est interdite.

 

Le sportif, ce héros des temps modernes, est-il alors plus qu’un simple athlète ? Il doit, en plus d’être performant, être exemplaire dans toutes les facettes de sa vie !

 

De plus, la lutte a toujours eu du retard par rapport au dopage. En témoigne l’affaire du laboratoire Balco en 2003, qui avait fabriqué un nouveau produit indétectable lors des contrôles et dont ont profité de nombreux sportifs américains.
Ce procédé sera sans aucun doute réutilisé par d’autres laboratoires, dans d’autres pays. Faut-il alors accepter que les sanctions ne tombent qu’à posteriori ? La peur d’être pris est-elle suffisante pour mener la lutte ?

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